La différenciation en marketing est une condition nécessaire au succès d’un produit. La concurrence est aujourd’hui devenue exponentielle grâce ou à cause d’internet qui a mondialisé las marchés. C’est pourquoi assurer sa visibilité ne suffit pas. Offrir un avantage concurrentiel est le nerf de la guerre. Pourtant, en marketing, l’enfer, ce n’est pas toujours les autres. Comment tirer parti de la concurrence pour créer une offre différente ?
La différenciation et le produit : mission possible
Une offre est composée d’un assemblage de nombreux paramètres. Entre les caractéristiques d’un produit, ses qualités, sa sophistication, sa valeur perçue, son coût pour le consommateur et les services qui lui sont associés, un produit ou un service sont comme de la pâte à modeler. De ce fait, produire une offre unique est parfaitement possible. Ce n’est pas parce que des millions de romans d’amour ont été écrits qu’ils l’ont tous été. N’importe quel auteur peut en créer un inédit, même si le l’archétype de Tristan et Yseult y sera toujours présent…
La différenciation ? Connaître l’offre de référence
Pour autant, ces paramètres de différenciation sont relatifs. Car pour se différencier, il faut bien que ce soit par rapport à quelque chose.
Dans tous les secteurs d’activité, il existe de manière intangible une offre de référence. Nous nous plaçons ici dans la psychologie, voire justement dans les archétypes du consommateur à un moment donné. Cette offre, c’est ce que la majorité attend du marché. Le prix attractif n’est alors qu’un simple paramètre parmi des dizaines d’autres.
Une histoire d’archétypes
Par exemple, en 2017, l’archétype du PC est le suivant : léger, puissant, silencieux, muni d’un écran très lisible et non fatigant pour l’œil, fiable sur la durée, ergonomique et pas cher. Je peux ainsi proposer un PC présentant toutes ces caractéristiques, mais orienté jeux vidéo. Il sera donc 10 fois plus puissant qu’un autre et 2 fois plus cher car il sera aussi léger, plus beau, inspirant une qualité haut de gamme. C’est ce qu’Asus a osé faire en proposant sa mythique gamme ROG. Vend-il pour cela moins de PC haut de gamme qu’Apple ? Non. Au dernier trimestre 2016, Asus a vendu 5,45 millions de PC contre 5,44 pour Apple (étude Gartner).
Ainsi, l’offre de référence est le cœur du marché concernant un hypothétique consommateur lambda. On conçoit que d’habitude, une offre plus chère que la référence propose des caractéristiques supérieures, transformées ou améliorées. Ou qu’inversement, une offre moins chère s’appuie sur son prix pour attirer le consommateur tout en baissant la qualité de certains paramètres.
La différenciation : dans la limite de la rentabilité
On peut donc tout imaginer pour différencier un produit de l’offre standard. Cependant, en réalité, s’écarter de l’offre de référence à l’infini n’est pas rationnel. Car un marché n’est lui-même pas illimité et que la demande se fonde elle aussi sur l’archétype qu’est l’offre de référence. Dès lors, les leviers de différenciation sont plus limités qu’il y paraît. La rentabilité prime dans le raisonnement d’une entreprise.
L’offre de référence est pratiquement toujours proposée par l’entreprise qui domine le secteur du marché. Souvent, celle-ci est déclinée en gamme ciblant souvent différents segments de marché.
Par exemple, dans le marché des citadines, Renault a inventé le concept de la Renault 5 : petite, pas chère, « mignonne », moderne avec ses pare-chocs en composite, offrant un hayon sans être un break. Ce standard a été, depuis, décliné par toutes les marques. Tandis que, chez Renault, la 5 devenait Super 5 puis Clio (quatre générations), la concurrence s’est alignée. Peugeot a sorti la 205, devenue 206 puis 207 puis 208. Quelles différences ? Sur le papier, techniquement, aucune. Mêmes puissances moteur, mêmes dimensions, mêmes équipements, même déclinaison de gammes, même alignement tarifaire. Ce qui change ? Le design, l’image de la marque, la réputation du SAV. Au total, en 2016, sur plus de 2 millions de voitures vendues, la Clio a représenté 5,6 % du marché du neuf, 1re voiture la plus vendue en France, suivie… de la 208, 4,9 % du marché, en 2e position globale…
De cet exemple, on comprend immédiatement que c’est la perception de l’offre qui déclenche l’achat. La valeur perçue est fondamentale, autant que le prix d’achat lui-même.
La valeur perçue comme élément clef de différenciation
Cette valeur perçue ne concerne pas seulement le produit, mais aussi toute l’offre qui l’entoure : SAV, garanties, financement, fiabilité long terme. Ce qu’il faut donc en déduire, c’est que la valeur perçue est, pour une offre, aussi importante que ses qualités intrinsèques.
La différenciation est donc un facteur important pour créer une offre, très souvent dans la déclinaison de la valeur perçue. Accroître cette dernière rendra possible l’augmentation du prix par rapport à l’offre de référence. C’est ce qu’a fait Mini (dont le propriétaire est BMW) en vendant moins, mais plus cher tout en se réappropriant un mythe automobile. On parle de positionnement différencié.
En revanche, abaisser la valeur perçue a permis à Dacia (dont le propriétaire est Renault) de vendre beaucoup plus à des prix plus bas. On parle de positionnement low cost.
Premium ou low cost ?
56 200 Dacia Sandero ont été vendues en France en 2016, contre 17 000 Mini III. On compte 14 versions de Sandero de 8 000 € à 14 750 € sans option contre 148 versions pour la deuxième allant de 16 000 € à 36 500 € sans option. Dès lors, le plus rentable est-il de vendre moins, mais plus cher, ou plus, mais moins cher ? Le chiffre d’affaires de BMW est en 2015 de 92,2 milliards d’euros pour 2,25 millions de véhicules vendus, tandis que celui de Renault est de 45 milliards d’euros pour 8,5 millions de voitures vendues dans le monde. Ceci montre bel et bien que la différenciation par le prix n’est pas la seule clef possible pour générer du chiffre d’affaires.
La différenciation, c’est donc s’écarter, par la valeur perçue et le prix, de l’offre de référence, que ce soit vers le haut (positionnement différencié), ou vers le bas (positionnement low cost). C’est au marketing que revient la mission de concevoir cette valeur perçue afin de créer une différenciation correspondant au plus près aux attentes du marché.