Face à une offre, on sait que les ressorts d’action ou d’inaction d’un lead sont issus de ses motivations et de ses freins. S’appuyant sur l’analyse des besoins, les leviers de motivation sont donc primordiaux à la conception d’un produit.
Motivation : satisfaction ou engagement ?
En marketing, on considère traditionnellement que l’action d’achat est sous-tendue par la motivation à combler un besoin insatisfait. Créer une tension s’appuyant sur la frustration autour d’un problème en vendant la résolution à ce problème semble donc logique.
Cependant, en 2017, attention à ne pas tout miser sur la satisfaction. Pourquoi ? Parce qu’elle n’est qu’une émotion, et que l’émotion est passagère. Or, l’objectif est de fidéliser un client. Il ne s’agit pas qu’il n’agisse qu’une seule fois, mais qu’il revienne. Dès lors, nous préférons viser l’engagement client, qui est une motivation sur le long terme et qui dépasse l’émotion passagère.
En revanche, l’engagement passe par l’étape de la satisfaction. L’offre se fonde donc sur la psychologie. L’analyse du besoin peut donc mettre au jour différents types de motivations ou de freins qu’il va falloir saisir et résoudre.
L’équation se résume en manque et en recherche de comblement de ce manque par la motivation.
La typologie traditionnelle des motivations
Les motivations rationnelles
Le client perçoit la valeur du produit comme répondant à ses intérêts, ou possédant plus de bénéfices que d’inconvénients pour lui.
La motivation rationnelle induit, en revanche, le frein selon lequel le produit présente plus de désavantages que de bénéfices.
Les exemples d’achats motivés par la raison sont nombreux. Par exemple, un consommateur peut préférer faire ses courses dans une grande surface low cost car il recherche un rapport qualité/prix avantageux. Le frein possible à cette attitude serait la crainte de produits de moindre qualité par rapport à une grande surface traditionnelle. Ce raisonnement vaut également pour les voyages en avion.
Autre exemple, un gros rouleur peut se tourner vers un véhicule diesel, car rationnellement, il saura que le prix majoré à l’achat sera rentabilisé au bout de x kilomètres par le coût plus faible du carburant. Un petit rouleur n’ira pas jusqu’à ce kilométrage. En revanche, le frein à cet achat peut être de plusieurs ordres : le diesel pollue davantage que l’essence, le véhicule est souvent moins agréable à conduire, plus bruyant et moins valorisant. Même si beaucoup de constructeurs font en sorte de démontrer le contraire, preuve qu’ils s’adressent à la raison du consommateur.
Les motivations hédonistes
La recherche du plaisir est un levier très fort de motivation. Le produit offre alors la promesse de ce plaisir.
Le frein traditionnel à la motivation hédoniste est une valeur perçue comme possiblement désagréable, la crainte qu’un écart existe entre la promesse et la réalité du produit.
Le marketing utilise beaucoup le ressort du plaisir dans la publicité, le design du produit ou son positionnement. Ici, la valeur perçue est essentielle.
Par exemple, le secret des formules induit une exclusivité garantissant le plaisir dans l’utilisation du produit. Coca Cola conserve jalousement ses recettes. Tout comme les pasteis de nata de Belém, petits flancs célèbres de Lisbonne, souvent imités, jamais égalés. Les parfumeurs font de même, établissant de très grandes marges par le design et l’exclusivité sur des produits dont les ingrédients sont malgré tout souvent traditionnels et, parfois, peu onéreux à l’achat. On vend ici du plaisir au consommateur et non le produit lui-même. C’est le ressort du premium.
En revanche, lorsque la raison reprend le dessus, le frein à ce type d’achat est l’analyse de ce qu’est réellement le produit. Par exemple, dans l’univers de l’électronique, les fabricants de consoles de jeux sortent des éditions limitées souvent 25 % plus onéreuses que les produits de base déjà très sophistiqués et quasiment identiques. Les passionnés seront fiers de posséder une déclinaison exclusive de cet objet produit à des millions d’exemplaires et seront prêts à payer plus. Alors que les entrailles de la machine sont identiques. Cela existe aussi beaucoup dans le monde des instruments de musique, comme pour le synthétiseur Korg Kronos et ses éditions Platinum ou Gold Limited Edition qui est doré… ou certaines basses Fender. Ceci concerne également différentes marques de montres. L’achat-plaisir est ici évident, mais si la raison l’emporte sur l’hédonisme, le consommateur se tournera vers le produit de base au détriment du produit exclusif.
Les motivations éthiques
L’achat éthique se fonde sur un devoir moral, la satisfaction de faire une bonne action.
Le frein à ce type d’achat est de ne pas être en accord avec les convictions véhiculées par le produit.
Le marché du bio en est un parfait exemple. Acheter des pommes bio est faire un geste pour l’environnement. Moins de pesticides, moins d’eau, pas d’OGM, pense-t-on. Mais des fruits plus chers et plus laids, que certains pensent, à tort ou à raison, moins savoureux. Cet achat récompense également les efforts et la démarche éthique engagée par le producteur. Le frein à cet achat, pour un consommateur, peut être le doute vis-à-vis du label « bio » qui est peu normé. Et l’apparence du fruit à côté de ces parfaites Granny Smith toutes lustrées et calibrées qui représentent l’archétype de la pomme idéale dans l’imaginaire.
On pensera également aux dons à certaines associations humanitaires. Offrir de l’argent à une association caritative est un geste éthique et déculpabilisant, et donc satisfaisant. Mais si la raison l’emporte, on peut dans certains cas comprendre que sur 10 € donnés, seuls 2 parviennent effectivement aux enfants du Sahel, le reste étant utilisé en frais de fonctionnement… et en marge. Le doute persistant issu de différents scandales bien connus est le frein principal à ce business, ainsi qu’une très grande concurrence qui rend leur éthique suspecte pour certains consommateurs.
Les motivations sont-elles conscientes ou inconscientes ?
Puisque nous sommes ici dans la psychologie du consommateur, la question se résume vite. L’état de satisfaction est-il constant ? Non. La tension naissant de l’insatisfaction à des besoins l’est-elle aussi ? Pas davantage.
Si l’on se fonde sur la pyramide de Maslow, on conçoit que les besoins primaires soient récurrents, comme la faim, la soif… Ils sont donc latents, et passer devant une boulangerie qui sent bon donne faim.
Ceci est plus complexe au fur et à mesure que l’on grimpe les échelles de la pyramide de Maslow. Une marque sert souvent de déclencheur.
Par exemple, croiser le logo Nike sur des affiches publicitaires, dans la rue ou le métro, ne donne pas envie de courir. Mais il fait appel à l’insatisfaction du désir d’accomplissement personnel, motivation très forte. Nike, c’est la performance et la réussite des plus grands champions. Le ressort de motivation est très ancré autant dans la raison que dans le plaisir, et peut rendre actif ce besoin qui ne cessera d’être latent tout au long d’une vie.
Les freins de la raison restent les plus forts
Mais il faut se méfier de l’axiome de la publicité de masse qui, dans les années 40 jusqu’aux années 80, prétendait que la publicité pouvait induire un comportement. Cela n’est pas le cas, car un consommateur décidé n’achètera pas un produit. Pourquoi ? Parce que les freins de sa raison restent les plus forts. Quelqu’un qui a par exemple décidé que son budget personnel, serré, serait alloué au bien-être de ses enfants, ne prendra pas de crédit pour une voiture de luxe qui pourtant le satisferait pleinement. Il s’endettera moins et optera pour une familiale peu sexy mais très fonctionnelle. C’est toute l’histoire du Renault Scenic.
Dans le domaine du snacking, tout le monde rêve d’acheter des barres chocolatées au caramel à chaque course. Mais la contradiction entre le plaisir procuré et la culpabilité de grossir, c’est-à-dire entre des motivations hédonistes et rationnelles, et entre la satisfaction de besoins physiques et d’accomplissement personnel (niveau 1 et niveau 5 dans la pyramide de Maslow) est un grand frein à l’achat. Ici, le conscient prend le pas sur l’inconscient.
Le marketing : l’identification des motivations et des freins
Dès lors, comment le consommateur choisit-il un produit plutôt qu’un autre ?
La concurrence par secteur est telle que la motivation principale (raison, plaisir, éthique) est souvent contrariée par une autre, qui est la comparaison entre les produits. Or, les produits peuvent parfaitement proposer les mêmes ressorts de satisfaction. Ainsi, ce sera le prix ou la valeur perçue qui feront la différence.
Les motivations et les freins induits par un produit se mesurent selon leur intensité. Il existe beaucoup de méthodes pour prévoir ces motivations et concevoir le produit pour y répondre. Traditionnellement, la plus habituelle est d’interviewer les consommateurs une fois le produit essayé, parfois avant (marketing participatif). On peut aussi tenter d’analyser les ressorts de motivation induits par le produit par l’analyse a priori des comportements à travers les sciences humaines. Les sondages sont aussi très employés, et ce sont alors les statistiques qui entrent en jeu. Mais dans tous les cas, il existe des marges d’erreur.
C’est pourquoi la tendance actuelle de mesure des motivations et les freins se situe sur deux autres plans bien différents. Le big data et l’insight.